D’un regard sévère et accusateur, la « douce » coréenne mirait depuis déjà quelques minutes l’ « être humain » qui lui faisait face, enfin si vraiment « être humain » pouvait être le terme utilisé pour définir la vision qu’avait Ae Chan du garçon qui se tenait face à elle. Beaucoup plus petit en taille comme en âge d’ailleurs, l’être humain en question, complètement apeuré, c’était amuser à l’origine à humilier Ae. Il devait avoir 14 ou 15 ans et n’avait très certainement pas compris qu’il ne fallait aucunement chercher sa voisine qui était d’autant plus cruelle avec les plus jeunes et plus petits qu’elle. Il est vrai qu’avec ceux qui lui faisaient trois fois sa taille, elle n’utilisait très certainement pas l’intimidation mais restait tout de même assez dangereuse et l’apparence n’importe laquelle ne l’adoucissait aucunement, pour elle tout le monde est à mettre dans le même panier, il faut juste savoir se comporter différemment selon la personne et la situation qu’elle doit faire face. La demoiselle tout aussi jolie qu’intelligente le menaça, impliquant les parents du garçon, lui déclarant que s’il ne faisait pas telle chose toutes les bêtises du garçon seraient révélées à ses géniteurs. Ae Chan qui était très attentive à la vie du quartier, était du genre à écouter tous les petits ragots et histoire et ça de n’importe qui, tout peut lui servir et un rien peut faire fléchir un pauvre gamin qui ne demandait qu’à s’amuser. Vu comme ça, la jeune femme avait cet aspect assez négatif qui pourtant n’empêchait aucunement le peuple de venir lui casser les burnes… Peut-être parce que son entourage était assez masochiste dans l’âme et tant mieux parce que sinon la pauvre s’ennuierait quotidiennement et serait bien obligé de venir chercher la merde. Chose qu’elle fait pourtant souvent, mais il est vrai que c’est toujours mieux quand c’est les autres qui viennent à toi.

La suite de la matinée ne fut aucunement singulière et assez monotone. Chez elle, elle passa le plus claire de son temps dans le jardin arrière, prêt du bois qui entourait le vaste manoir des Nam. Récitant à haute voix son texte pour la pièce de théâtre, la demoiselle travaillait sérieusement, cela était parfaitement normal car elle était le personnage principal et serait donc le personnage le plus en avant de la scène. Alors son jeu d’acteur devait être parfait et irréprochable. Après une bonne heure, elle entendit vaguement dans la cuisine arrière un ricanement et une voix assez roque qui se foutait clairement de sa gueule, enfin qui se foutait de la scène qu’elle jouait depuis maintenant un certain temps. S’arrêtant pour ruminer des pensées pas très belles, la jeune femme qui n’était aucunement une hystérique et qui n’allait pas poursuivre comme une gamin de 5 ans, son stupide demi-frère, celui qu’elle aimait le moins, eut un rapide sourire en coin puis continua sa récitation « - Je t’aime Im Soon… Veux-tu sortir avec moi ? – Jae Sun tu fais vraiment pitié, sortir avec toi, non mais tu re… - » Avant même qu’elle puisse finir sa phrase, elle entendit le demi-frère débouler de la cuisine pour sortir dehors et tenter de frapper sa sœur. Le texte qu’elle venait de réciter n’était aucunement celui se trouvant sur sa feuille, c’était le râteau de son demi-frère qu’il venait de prendre il y a déjà quelques jours de ça. Après une petite course, la demoiselle chuta faussement, essoufflée, sachant que ses parents n’étaient pas loin, elle s’écria « Papa… Papaaa… Jae Sun m’a frappé… Papa vient m’aider » Elle n’appelait jamais sa belle-mère car elle savait qu’elle ne pouvait retirer aucun avantage de cette femme qu’en réalité et malgré les apparences Ae Chan n’appréciait pas vraiment.

Le père se pointa rapidement et bêtement comme à son habitude réprimanda le demi-frère qui en réalité n’avait rien fait. Quand le paternel s’éloigna, elle n’oublia aucunement de narguer le garçon pour toute joyeuse gambader jusqu’à la cuisine… Elle avait maintenant une faim de loup et il était midi. Le père quittant la maison, la mère absente, les autres frères et sœurs de même absent à part le demi-frère qu’elle venait d’avoir, la jeune fille chercha longuement le plat préparé par sa belle-mère avant de découvrir qu’il a été ingurgité par cette saleté de parasite qu'était son malheureux frères, quelques minutes auparavant. Encore plus effrayante affamée, la demoiselle ne manqua aucunement de chercher des noises à son demi-frère et disparu dans le Hall pour se diriger vers le supermarché… S’il n’avait plus rien pour elle ici autant aller le chercher toute seule. Ça l’embêtait bien, il fallait l’avouer… Mais elle ne pouvait que compter sur elle-même quand ça concernait la nourriture. N’oubliant aucunement son porte-monnaie et sortie du manoir pour se rendre directement à la grande surface. Sur place elle prit rapidement deux trois délicieux mets qu’elle mangera sur le chemin, privilégiant la gastronomie rapide pour éviter de passer des heures à préparer son repas puis avant même de passer à la caisse, le regard de la demoiselle croisa celui d’une connaissance, Il Keun. Le sourire aux lèvres, oubliant sa faim, la demoiselle s’avança vers lui tout en lui prenant le bras, elle articula mielleusement. « Keunie, mon chou… Comment vas-tu ? »

Je n’ai jamais compris la manie de mes parents à me jeter leurs clés de voiture à la tête dès lors que je leur demande un peu de fric pour sortir… Et encore à l’instant, alors que je venais tout juste de me lever, mes yeux ouverts seulement à moitié, plutôt mal réveillé, mon père m’avait balancé les clés de sa Maserati dans la face alors que je lui avais juste demandé sa carte pour pouvoir bouger dans l’après-midi… Grimaçant un instant, je manquais de lui gueuler dessus pour lui faire comprendre que cette manie serait bonne à laisser tomber, qu’il ferait mieux de tirer un trait dessus parce que s’il continuait dans cette voie-là, il risquerait de se retrouver avec sa propre « arme » encastrée dans le ventre ; mais ça, heureusement que je m’étais retenu pour ne pas le sortir. La seule chose que j’avais faite, c’était de gémir plus fort qu’un ours de mauvaise humeur ne l’aurait fait, avant de m’emparer de la carte bancaire qu’il s’était mis à me tendre quelques secondes après son magnifique lancé – d’ailleurs, il avait vachement bien visé ; mais heureusement qu’il n’avait pas eu envie de me crever un œil, parce qu’il aurait parfaitement réussi. Et une fois les deux éléments importants dans mes mains, j’avais filé plus vite que la lumière au deuxième étage de la villa afin de me prélasser dans un bon bain pour finalement m’habiller, en remarquant bien que… j’avais la dalle. Filant à nouveau au rez-de-chaussée, je m’exclamais quelques paroles mal articulées à ma mère qui me répondit simplement que je n’avais qu’à faire des courses si je n’étais même pas fichu d’être poli… Poli ? Haha, quelle blague. Alors oui, j’allais les faire ces courses, pour la simple et bonne raison que je n’avais aucune envie de lui sortir une nouvelle fois l’un de mes « s’il te plaît » si rares.

Je n’avais pas cherché franchement loin concernant ma tenue, un simple jean et un t-shirt totalement noir irait parfaitement. Sauf que pour cacher le fait que je n’étais absolument pas coiffé, il m’avait fallu l’une de mes casquettes… Et j’en avais tellement qu’il m’avait fallu quelque quinzaine de minutes afin de choisir l’une des toutes dernières que j’avais acheté. Je me rendis bien vite compte en passant devant un miroir qu’aujourd’hui, j’avais sacrément une sale mine et que… c’était tout bonnement impossible de sortir sans couvrir mes yeux totalement défoncés par la fête de la veille, sans aucun doute à cause de l’alcool et de la drogue que j’avais consommé. Mais non, mes parents étaient tellement habitués à me voir dans un tel état qu’ils ne tentaient même plus de me résonner… Lunettes de soleil sur le nez, je filais donc en direction du garage pour me jeter dans la voiture à mon père, et finalement filer en direction du supermarché. Il ne me fallu pas bien longtemps pour poser mes baskets dans les rayons du magasin, sauf qu’après à peine cinq minutes, j’avais pu croiser le regard d’une jeune femme dont je me serais bien passé au moment présent… Marmonnant quelques paroles quasiment inaudibles pour souligner mon froncement de sourcils dû à mon mécontentement – et heureusement que mes yeux et mes sourcils étaient cachés par ces grosses lunettes –, je me demandais si elle allait avoir le cran de venir me déranger ou si elle allait se contenter de me fixer de lui… Et dommage, la voilà qui s’avançait vers moi. « Keunie, mon chou… Comment vas-tu ? » Comment j’allais ? Comique, tout ça. Et sans même prendre la peine de la saluer – puisqu’elle-même ne l’avait pas fait, puis ce n’était pas mon genre –, je pris directement la parole : « Tiens donc, Ae Chan, ma grande amie… Parfaitement bien écoute, et je suis certain que ça durera, surtout maintenant que je t’ai vue... Je demande pas te concernant, t’as l’air d’être en forme ; puis je sais que tu n’as absolument pas le temps de rester là comme une idiote, et c’est bien dommage ! » J’avais accentué mes paroles avec un sourire en coin. Je n’avais aucunement l’envie de lui parler plus que ça, ni même de la voir, alors je ne m’attardais pas : en deux temps trois mouvements je m’étais dirigé vers un autre rayon après l’avoir fait lâcher mon bras – ou du moins, tenté –, la snobant totalement, comme si elle n’avait été qu’une illusion.

Se rendre au supermarché était une chose assez rare pour la demoiselle qui demandait le plus souvent aux bonnes d'aller lui chercher de la nourriture, mais comme ces dernières étaient en congé et que le vilain demi-frère avait mangé son repas de midi, elle fut dans l'obligation de s'y déplacer. Après avoir passé un peu beaucoup de temps à chercher un plat rapide et bon à manger, se trompant souvent de rayon, la demoiselle tomba sur son ex-petit ami, Il Keun. « Tiens donc, Ae Chan, ma grande amie… » Souriant bêtement, chose qu’elle savait parfaitement faire… Ce n’est point difficile de sourire que ce soit bêtement comme franchement, elle voulait devenir actrice il fallait donc que chacune de ses actions soient vraies même si la réalité est toute autre. Jouer un rôle est donc l’un des plus grand talent de la coréenne. La demoiselle en entendant « ma grande amie » ne put que jubiler intérieurement, elle avait tellement faim et elle le sentait mais elle avait aussi cette envie irrésistible d’emmerder son monde et comme cela faisait depuis un certain temps qu’elle n’avait pas vu son Keunie chou, elle pouvait enfin s’amuser avec lui. Un ami ? Il Keun ne l’a jamais été et cela malgré les apparences… Enfin ce n’est pas qu’elle ne l’apprécie pas ou tout du moins, elle ne le déteste pas à proprement parler, mais elle le considère plus comme un jouet, un objet sur lequel elle peut se défouler, quelque chose qui puisse l’occuper un peu, parce qu’elle a toujours ses demi-frères… mais ceci deviennent de plus en plus ennuyant et c’est plus vraiment jubilant de foutre la merde, c’est peut-être bénéfique pour eux mais moins pour sa nouvelle victime, Il Keun. « Parfaitement bien écoute, et je suis certain que ça durera, surtout maintenant que je t’ai vue... Je demande pas te concernant, t’as l’air d’être en forme ; » Ae Chan avait parfaitement comprit que c’était purement ironique, elle n’était aucunement stupide et elle comprenait rapidement les choses, le ton comme la situation indiquait clairement que son « ami » n’était très certainement pas heureux de la voir et n’avait qu’une envie fuir.

« puis je sais que tu n’as absolument pas le temps de rester là comme une idiote, et c’est bien dommage ! » Tout en essayant de le bloquer avec ses bras, Ae Chan ne put que lâcher le fuyard. Le regardant se diriger vers un autre rayon pour tenter de s’y cacher, la demoiselle ne put s’empêcher de grandement sourire avant de s’écrier joyeusement « KEUNIE CHOU… ATTENDS-MOI ! » comme si Il Keun était son chéri ou tout du moins quelque chose dans le genre. Il faut bien savoir que le jeune homme n’est aucunement son petit copain, il l’a été à une époque lointaine, la relation avait duré quelque temps puis elle avait pris fin simplement parce que Ae Chan ne le trouvait plus amusant ni même intéressant. Maintenant qu’il n’était plus ensemble et que celui-ci avait trouvé une nouvelle petite amie, il est vrai qu’elle le trouvait beaucoup plus attractif et depuis elle s’amuse à foutre la pagaille dans le couple que forment le beau garçon et sa dulcinée. Le rejoignant rapidement dans le rayon où il avait fui, la demoiselle ne voulant plus le laisser partir s’était presque agrippée à lui. Il n’avait tous les deux pas la même corpulence mais malgré tout, la demoiselle avait tout de même un certain poids et elle pouvait freiner un tant soit peu le garçon. « Meuh non mon chou, j’ai toujours le temps pour toi ! » Les bras entourant la taille du garçon, la tête posée sur son dos, le panier, où se trouve la nourriture du midi, à terre. Elle continua « Je suis certaine que tu es content de me voir, moi et… » Le grand sourire presque sadique aux lèvres, elle se détacha de Il Keun pour se tourner vers une dame qui se trouvait à côté d’eux « … et notre bébé… » criant presque pour bien que tout le magasin puisse entendre.

Lancer des rumeurs c’est parfaitement le genre d’Ae Chan qui y prenait un malin plaisir et puis même si cela ne sortirait jamais de la supérette car les gens qui viennent ici se foute bien des histoires des autres, il est vrai qu’il était assez hilarant de faire paniquer Il Keun. Sans attendre de réponse la jeune femme continua rapidement « Oui, je viens tous juste de l’apprendre mon chou, je suis enceinte de toi. » Il Keun le savait parfaitement, Ae Chan n’était pas enceinte et encore moins de lui et ça la demoiselle en avait parfaitement conscience.