Une étreinte passionnée, l'excitation dû au danger d'être surpris par un proche, l'allumette qui craque tandis que la chambre s’imprègne lentement de l'odeur âcre du tabac, les mêmes mots, les mêmes gestes. Les moments heureux et tristes, les disputes et puis cette étreinte ... encore et toujours la même. Tout ceci n'était devenu qu'une routine permanente, un engrenage sans fin dans lequel ils avaient tous deux finit par plonger. Pouvait-on encore appeler ça de l'amour ? Ne cherchaient-ils pas seulement à avoir de la compagnie ? De vulgaires partenaires sexuels, voilà ce qu'ils avaient été. Le terme sex friend lui-même n'est pas correct, à vrai dire. Luka n'a jamais pu la considérer comme étant son « amie » vu la manière dont il avait pu la traiter. Et pourtant, pour elle, cette relation signifiait bien plus qu'une vulgaire retrouvaille dans leurs chambres respectives. Min Su l'avait aimé cet homme, il était celui qui avait fait d'elle une femme à part entière. La façon dont il se moquait d'elle, un rictus charmeur aux lèvres. Ces autres femmes qu'il fréquentait sans se soucier du mal qu'il lui faisait. Et ce départ précipité.

« Kept playing love like it was just a game... » C'est dans un mouvement de sursaut que Min Su ouvrit les yeux, après le rêve qu'elle venait de faire ce n'était vraiment pas la chanson à avoir comme réveil. L'enfant saisit son téléphone et coupa le son affreux qui en émanait tandis qu'elle émergeait lentement des draps encore chauds de son lit. La nuit avait été longue à force de dramas, émissions sur Eun Sil et autres jeux malsains auquel seule une fille pareille pouvait jouer sans en éprouver de la gêne. Elle sourit en pensant aux divers garçons qu'elle avait enfin réussi à séduire dans ce foutu jeu de simulation tandis que, d'un pas nonchalant, Min Su se dirigeait vers son armoire. Elle enfila un long sweat sur lequel le logo des Ramones était fièrement affiché, le genre de vêtement large pour homme. Du haut de ses un mètre soixante et un, elle ne ressemblait décidément à rien là-dedans. Elle prit la peine de se contempler dans son miroir : le vêtement était si ample que l'enfant devait le retrousser plusieurs fois afin d'y sortir ses mains. Mais que diable faisait-elle donc avec un sweat aussi grand ? Elle n'avait pas réussi à s'en séparer lorsqu'il était parti et pourtant ... combien de fois s'était-elle donc résolue à l'oublier ? Comment voulez-vous faire sortir de votre tête un homme qui hante vos songes ? Min Su se maudit intérieurement, buvant une tasse de café en s'asseyant sur la table de la salle à manger. Elle admira le paysage que lui offrait sa baie-vitrée, une vue qu'elle appréciait plus particulièrement la nuit lorsque tous ces grattes-ciels étaient illuminés. Cet appartement était synonyme de nouveau départ pour elle. La séparation avec ses grands-parents avait été certes douloureuse mais nécessaire, il lui était devenu impossible de dormir dans cette chambre mais surtout dans ce lit. Pour elle, il lui fallait changer d'endroit, afin de pouvoir réellement tourner la page sur cette partie de sa vie. Une petite année, si longue mais à la fois si courte... Le bordel s'y était installé, une tornade causée par un seul homme. Ils étaient jeunes, peut-être trop. Si seulement ils ne s'étaient jamais rencontrés. L'air amer, l'enfant posa sa tasse dans l'évier avant de se diriger vers la salle de bain. Elle tenta de se remonter le moral en pensant à la longue journée d'excitation qui l'attendait devant son ordinateur. La demoiselle attacha ses cheveux en un chignon dont quelques mèches s'échappaient, lui donnant un air quelque peu sauvage. Min Su se passa de l'eau sur le visage et entama de se brosser les dents. Sa chaîne-hifi se mit à lui jouer quelques de ses morceaux favoris tandis que la jeune fille faisait les cents pas dans son salon, s'amusant à compter le nombre de secondes équivalent à trois minutes mentalement.

La sonnette retentit alors, l'enfant jura mentalement après s'être perdue dans ses chiffres. Elle éteignit la musique en fixant sa porte puis l'horloge accroché au mur : 13:16. Qui venait la voir à cette heure ? La demoiselle attendait, certes, son nouveau colocataire mais certainement pas à une heure aussi matinale. Curieuse malgré tout, Min Su se dirigea vers la porte d'entrée alors que sa brosse à dents était toujours dans sa bouche et que le tube de dentifrice, même pas encore refermé, était entre ses doigts. Une fille ? Un garçon ? Qui allait donc être ce colocataire tant attendu ? Avec un peu de chance, un second geek ? Qui sait ! Elle sourit comme une enfant à cette idée, trépignant sur place en ouvrant sa porte. La première chose qu'elle vit, dû a sa petite taille, fût un torse masculin. La demoiselle releva lentement la tête vers le visage de cet inconnu... « ... ... ... #@£$O ?! »

Lui. Ici. L'information avait mit du temps à monter jusqu'à son cerveau. Elle manqua de s'étouffer, puis de le tuer, de l'assommer, de l'étriper, de le pendre, de l'émasculer, de le torturer. Elle saisit le tube qui gisait dans ses mains et qu'elle avait bien failli tout bonnement écrabouiller, le pressa dans sa main d'un geste rageur pour lui étaler le contenu sur sa chemise qu'elle jugeait tout bonnement à chier ou même encore à vomir. Elle referma vivement la porte une fois son acte vil accompli, craignant la colère qui allait s'abattre sur sa tête si jamais elle ne se protégeait pas. Il allait la massacrer, tout simplement. Elle courut se réfugier dans la salle de bain, prit soin de s'y enfermer tout en tentant d'analyser clairement la situation. Elle se rinça la bouche et s'assit sur le rebord de sa baignoire. Luka Mikkelsen, son ex, son partenaire, le mec dont elle avait rêvé la nuit dernière, l'homme de toutes ses premières fois, son bourreau, sa croix ... Bref, IL était là. Derrière sa porte désormais barricadé afin de se protéger de sa colère imminente. Elle tendit l'oreille lorsque un bruit de serrure se fit entendre. « Oh merde... »

C'etait donc là qu'elle habitait ? Le jeune homme leva la tête pour tenter d'apercevoir sa fenêtre, il sourit en aspirant la dernière bouffée de sa cigarette puis l'ecrasa sur le trottoir.

Kwon Min Su, Appartement 66.

Pendant un instant il pensa à sonner puis il se ravisa, préférant lui faire la surprise. Il extirpa du fond de sa poche son trousseau de clé et pénétra dans le hall luxueux du bâtiment. Au moins il ne serait pas dépaysé, pensa t-il en souriant à nouveau. Décidément, il était de bonne humeur aujourd’hui, il ne s'agirait pas d'en prendre l'habitude. Et pourtant, il ne pouvait pas s’empêcher d'afficher cet air béat, certainement pas à cause d'elle. Non si il était heureux c’était simplement du au fait qu'ici tout était nouveau pour lui. Il avait toujours aimé déménager, découvrir de nouveaux endroits. Durant le voyage en taxi il avait eu tout le loisir d'admirer le paysage urbain d'Incheon, et ce qu'il en avait vu lui avait plus. Non décidément rien à voir avec elle.

*Ding* Il jeta un dernier coup d’œil à son reflet dans le miroir de l'ascenseur se recoiffant puis ébouriffant ses cheveux. Il était à tomber, comme toujours. Confiant, il s'avança vers la porte lisse au bout du couloir. Il prit une grande inspiration, passa une nouvelle fois sa main dans ses cheveux et sonna. Il pouvait entendre la musique à l’intérieur de l'appartement, une chanson que seule une otaku pareille pourrait écouter. Il s’apprêtait à sonner une nouvelle fois lorsque la porte s'ouvrit. Et elle se tenait là devant lui, dans ce sweat immense qui autrefois lui avait appartenu. Il ressentit une légère bouffée de chaleur à cette pensée, sans savoir vraiment pourquoi, mais à peine avait-il eu le temps de se questionner que la sensation avait disparue. Elle avait l'air... Surprise, bien que le mot parusse faible pour décrire l'expression qui s’était dessinée sur son visage.

« ... ... ... #@£$O ?! » Malgré sa bouche emplie de dentifrice il lui sembla reconnaitre une de ses insultes préférés. Décidément, elle n'avait pas changée.Il n'aurait pas été surprit qu'elle se mette à gonfler les joues en le fixant de son air de bébé. Mais apparemment elle avait, pour une fois, décidé d'être offensive car il se retrouva barbouillé de dentifrice avant même d'avoir pu amorcer un mouvement.
Puis, brusquement elle lui claqua la porte au nez.

« FUCK! »

Oh la garce, l'immonde petite garce. Comment avait-elle osé ? Sa chemise allait être foutue maintenant. Génial. Vraiment, quel accueil !
Elle aurait au moins pu faire semblant d'être un tant soit peu contente de le revoir, ou même simplement le saluer, cela aurait été la moindre des politesses. Mais apparemment c’était trop demander à une gamine de son genre. Les yeux clos il tenta de se calmer. Après tout ici c’était aussi chez lui maintenant. Il ressortit son trousseau de clé et en introduisit plusieurs avant de trouver la bonne. Il fit quelques pas dans l'appartement qui semblait vide. Ou avait elle pu aller ? Elle ne se cachait quand même pas de lui ? Sans qu'il sache pourquoi cette pensée lui fit de la peine. Deux ans qu'ils ne s’étaient pas vu et voilà comme il était reçu. Ce n'etait pas exactement le genre de retrouvaille qu'il avait imaginé. Quand il y repensait Min Su était toujours souriante , elle lui sautait dans les bras avant de lui dire à quel point il lui avait manqué et à quel point elle l'aimait, qu'elle l'avait attendu et ardemment espéré sa venue. Il entreprit de la chercher, visitant par la même occasion l'appartement qu'ils allaient partager. C’était spacieux et lumineux. Agréable. Le salon possédait une immense baie vitrée qui fit naitre une lueur coquine au fond de ses yeux. Il trouva finalement la seule porte close de l'habitation, qu'il supposait être la salle de bain et y toqua doucement.

« Tu compte te cacher ici longtemps ? C'est un peu infantile comme solution tu ne trouves pas ? Je pensais que tu aurais un peu grandi en deux ans de séparation. Apparemment je me suis trompé. » Il rit doucement sachant qu'il avait touché un point sensible étant donné sa grande susceptibilité. « Est ce comme ça qu'une petite amie digne de ce nom accueille l'homme qui partage son lit? Tu sais, si tu me laissais entrer, je suis sur qu'on s'amuserait beaucoup plus à deux là dedans... »

Il pouvait très bien se la représenter, Luka était même absolument sûr qu'à ce moment elle se tenait, toute frêle et tremblotante, assise sur le rebord de la baignoire se demandant si elle allait lui ouvrir. Le choix ne devrait pas lui prendre plus de quelques secondes, après tout comment pourrait elle lui résister ?

Il avait donc osé revenir en Corée. Luka était bel et bien de retour, oui, mais pour quelles raisons ? Qu'est-ce qui avait bien pu le pousser à remettre les pieds ici, a Incheon qui plus est ? Une visite de courtoisie ? Surement pas, après la manière dont il l'avait quitté, cette hypothèse était tout bonnement improbable. Il n'avait pas changé, l'enfant ne pouvait s'empêcher de le trouver attirant et ce malgré leur passé plutôt ... agité, mouvementé. Luka avait toujours eu confiance en lui, une chose qui déconcerté Min Su depuis le début de leur relation. Cette rencontre qui n'aurait peut-être jamais dû voir le jour, désormais gravée en elle, ne cessait de lui revenir en mémoire : une malheureuse tâche avait tout provoquée. En y repensant, il était assez étonnant que le jeune homme ne se soit pas énervé sur elle, il s'était contenté de l'inviter à boire un verre. Durant cette soirée, tout n'avait été que charme, jeu de séduction, vice et manipulation. La nuit qui s'en suivie fût tout bonnement magique pour l'enfant, simplement jouissante pour l'homme. Vint le rejet abject du garçon le lendemain matin, qui s'en suivi d'une relation douloureuse et plus qu'ambiguë. « FUCK ! »

Min Su étouffa un cri en entendant la porte s'ouvrir après ce juron si bien placé, elle s'assura que la porte de la salle de bain était bel et bien verrouillée et soupira, quelques peu soulagée par un bref sentiment de sécurité. L'oreille attentive au moindre de ses pas, l'enfant comprit bien vite l'atroce nouvelle que Luka allait lui confirmer. Pas de colocataire geek ou bien nolife, rien de tout ça ! L'enflure, il avait absolument tout prévu en fait. La jeune femme étouffa un cri de rage, donnant un coup de pied dans la baignoire pour exprimer son sentiment de frustration. Comment pouvait-il être aussi égoïste ? Décidément, il ne pensait vraiment qu'à lui, la douleur des autres ne l'importait guère, il n'en avait strictement rien à foutre, ma parole ! Il n'y avait pas d'autre explication logique : il aimait la faire souffrir. Désarmée face à une telle prise de conscience, les larmes montèrent aux yeux noisettes de la demoiselle tandis qu'au même moment, derrière la porte verrouillée, le son de sa voix se fit entendre une nouvelle fois. « Tu comptes te cacher ici longtemps ? C'est un peu infantile comme solution, tu ne trouves pas ? Je pensais que tu aurais un peu grandi en deux ans de séparation. Apparemment, je me suis trompé. » Le sang de l'enfant ne fit qu'un tour en entendant ces quelques phrases, Luka l'acheva moralement en étouffant son agaçant petit rire habituel. Alors qu'elle s'apprêtait tout bonnement à le noyer d'insultes, le jeune homme reprit de plus belle. « Est-ce comme ça qu'une petite amie digne de ce nom accueille l'homme qui partage son lit ? Tu sais, si tu me laissais entrer, je suis sûr qu'on s'amuserait beaucoup plus à deux là-dedans ... » S'en était trop, la jeune femme se leva d'un bond afin de franchir les quelques centimètres qui l'a séparé de la porte. Comment osait-il encore prétendre faire partie de sa vie ? Elle, sa petite-amie ? Quelle blague ! Il avait certes partager son lit, mais ce temps était désormais bel et bien révolu ! Indignée, humiliée par autant de nonchalance, Min Su se retint d'exploser. Non, elle ne devait pas tomber dans son jeu, il serait bien trop heureux de l'a voir s'emporter. L'enfant devait donc tenter de jouer sur le même terrain que son ancien amant. Sa jalousie et son besoin de la posséder avaient causé bien des disputes dans leur "couple" il y a deux ans, peut-être y serait-il encore sensible, après tout. La demoiselle croisa les bras contre sa poitrine en retournant s'asseoir sur le rebord de la baignoire, histoire d'assurer ses arrières si jamais Luka venait à exploser le premier. « Calmes tes hormones tout de suite, tu risquerais d'être vite déçu. Premièrement, il est tout bonnement impossible que je commette l'erreur de me remettre avec toi une seconde fois, alors oublies ça. Deuxièmement, même si tu étais le dernier homme sur cette planète, saches que jamais je ne retournerai dans le même lit que toi. Rien que d'y penser ça me donne envie de gerber, franchement. Bon nombre d'hommes sont venus te remplacer, pour ce qui est de tes insinuations perverses, je n'ai vraiment aucunement besoin de toi de ce côté-là. Tu me dégoûtes, savoir que l'on respire la même air me donne la nausée ! Tu ferais mieux de retourner dans ce pays pour lequel nous as quittés, tes putains et moi-même, car je ne veux clairement plus de toi ! Beau parleur à deux balles ... » Sur ces mots, l'enfant gonfla ses joues, une vieille habitude qui l'a prenait lorsqu'elle se décidait à bouder. La jeune femme espérait l'agacer, ne serait-ce qu'un peu, afin de savourer la rage déchirant son si beau visage.